Les Obrecht / Les
Hild / Les Schmitt /
Les Obrecht-Schmitt
1 > 2 > 3> 4 > 5
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> 9 > 10 > 11
> 12 > 13 > 14
> 15 > 16 > 17
Les généraux font la course
Lors de la
mobilisation, le 14e corps
d’armée a été
déployé depuis
la Suisse jusqu’à la vallée de Munster
avec pour
mission de verrouiller la frontière et, a minima, de couvrir
les
ponts du Rhin. Il
constitue
un
élément avancé (Abteilung B) de la
VIIe
armée dont le gros des troupes, sous les ordres de Von
Heeringen, est stationné en retrait
à Strasbourg
et sur
la rive droite du Rhin.
C’est ce corps de réservistes qui subira le
premier choc
des incursions des Français
qui, sous le commandement du général Bonneau,
tentent
d’établir une tête de pont en Haute
Alsace et occupent pendant quelques jours Mulhouse et les faubourgs de
Colmar. On a vu que c'est aussi un régiment de
réservistes non aguerris, le 99e, qui a été envoyé en
première ligne sur la Bruche pour contrer la 86e brigade des
chasseurs alpins ("brigade bleue") qui savent adroitement tirer parti
de la configuration accidentée du terrain.
Après avoir franchi la frontière le 25 août, le 99e RIR bivouaque
sous la pluie à la Grande Fosse. Le lendemain Alfred participe
à la charge à la baïonnette qui permet à sa
compagnie de s'emparer du col du Chariot. Les Français en effet
se replient vers Saint-Dié, mais en livrant des combats de
retardement. Le 28 août les Allemands entrent à Saint-Dié
et leurs officiers ont du mal à empêcher le pillage de
cette première cité conquise en territoire ennemi. Alfred
envoie depuis cette ville une carte postale que sa famille
reçoit le 11 septembre. Les jours suivants le 4e bataillon
occupe différentes hauteurs du voisinage. Sous une pluie
diluvienne offensives et contre-offensives se succèdent
dans les forêts inextricables du Haut-Saint-Jacques.
Inopinément l'ordre arrive alors de cesser toute
opération dans le secteur et d'obliquer vers le nord. Le
régiment s'éclipse discrètement de nuit sous une
pluie battante par des chemins forestiers défoncés. La 4e
compagnie perd dans ces conditions son fourgon de munitions,
tombé dans un ravin. On traverse la Lorraine à marche
forcée, passant à quelques kilomètres de Mittersheim,
le village d'origine des Schmitt. Par la Sarre, le Palatinat, le
régiment arrive à Coblence où il est
embarqué le 24 septembre dans un train qui, à travers le
massif de l'Eifel, le conduit à Liège, Namur et Cambrai
où il arrive le 27 septembre. C'est encore la guerre de
mouvement et on déplace les pièces sur l'échiquier
du front.
Quelle est la situation militaire? La VIIe armée de Von
Heeringen a été appelée
dès le 5 septembre à faire route vers l'ouest afin de
renforcer l'aile droite allemande où les armées
de Von
Bülow et Von
Kluck sont sur le point d'être tenues
en
échec lors de la première bataille de la Marne
entre le
6 et le 9 septembre. La VIIe armée, dont le 14e corps a
désormais pris le nom de "corps d'armée Gaede",
arrive
après la bataille, mais à temps pour contribuer
à
contenir la contre-offensive alliée sur l'Aisne qui s'épuise sur les retranchements allemands
de la
rive nord de l'Aisne et du Chemin des Dames. Commence alors la
"course à la
mer",
chacun des
belligérants
s'efforçant de déborder l'adversaire par l'ouest
Minuscule pièce dans ce combat titanesque, le 4e bataillon a
été débarqué à Lourches,
quelques kilomètres avant Cambrai. Le 28 septembre il marche
vers Bapaume, puis Courcelette. Alors que débutent les combats
pour le contrôle de la vallée de l'Ancre,
le bataillon est d'abord gardé en réserve dans un ravin
à l'est de Grandcourt. Le 5 octobre à 2 heures du
matin se déclenche l'assaut général sur Beaucourt-sur-Ancre
qui se termine par la prise du village le soir. Le 4e bataillon
était placé devant le Moulin Ruiné et la 14e
compagnie s'est emparée de la sortie ouest de la
localité. Les Allemands fortifient leurs positions sur la ligne
Beaumont-Beaucourt; les Français en font autant de leur
côté: c'est le début de la guerre de position.
bataille de Beaucourt (5 octobre 1914)
Les belligérants s'installent aussi confortablement que possible
dans des fortins de plus en plus sophistiqués. La nourriture,
fournie aux Allemands par les paysans payés en bons de
réquisition, est abondante. Les coups de main et duels
d'artillerie sont relativement peu meurtriers et le régiment n'a
à déplorer en moyenne qu'une dizaine de victimes par mois,
suffisamment toutefois pour que le 7 décembre soit
déjà inauguré le monument aux morts de Beaumont. Jusqu'à la
fin de l'année les Français font trois tentatives pour
reprendre Beaumont, la plus meutrière étant celle de la
nuit de Noël 1914 quand l'artillerie française bombarde
l'église de Beaumont où se déroule un office. Les
Allemands échoueront à leur tour dans une tentative de
percée le 11 avril 1915, privant d'une victoire
espérée le roi du Wurtemberg en visite dans le
secteur.
Dès le début des hostilités, et avant
même la stabilisation du front, une active correspondance
s'était établie entre Alfred et sa famille. Durant le
seul mois de septembre, la
famille n’envoie pas moins de 6 cartes, une lettre et un
télégramme; elle reçoit de son
côté 7
cartes et 2 lettres. Sept colis sont expédiés, au
tarif
préférentiel de la
«Feldpost», qui pour le
moment ne contiennent que des denrées de luxe,
essentiellement
chocolat et cigarettes. Ces paquets sont soigneusement
numérotés par Jean Obrecht et atteindront
déjà la centaine au 25 février 1915.
De la période du front de l'Ancre on ne possède qu'une
seule carte postale, arrivée le 12 avril 1915, qui annonce que
le régiment est au repos. Elle a été
expédiée de Beaumont et représente le
cimetère militaire allemand de Miraumont,
la principale localité du secteur. Une citation à
l'ordre de la division de la même époque confirme que la
14e compagnie a tenu sa tranchée depuis le 6 octobre 1914 sans
être relevée. Le destin a ainsi conduit Alfred une
première fois en Picardie,
cette province pour lui
étrangère où il laissera sa vie peu
avant la fin
de cette guerre. Ce schéma ne dit toutefois rien des
souffrances, des peurs, des privations qui ont
été le lot
des combattants des tranchées.
C'est alors que le 15 mai 1915 à midi le régiment
reçoit l'ordre de se rendre immédiatement à
Bapaume pour être mené en train dans le secteur d'Arras
où la première bataille de l'Artois
fait rage. Mais à ce moment-là Alfred, muté, ne
fait plus partie de l'unité et est déjà en route
pour le front russe.
dans l'abri du moulin à Beaumont-Hamel