ancetre1.htmllesobrecht1.htmlindex.html  





en permission


Les Obrecht / Les Hild / Les Schmitt / Les Obrecht-Schmitt

1 > 2 > 3> 4 > 5 > 6 > 7 > 8 > 9 > 10 > 11 > 12 > 13 > 14 > 15 > 16 > 17


A l'Est du nouveau

Cependant la guerre continue. En mai 1916, une lettre annonce la promotion d’Alfred au grade de sous-lieutenant avec effet du 17 mai. Désormais il touche une solde d’officier et le flux des mandats va s’inverser. Désormais c’est lui qui envoie régulièrement de l’argent à Mulhouse, une première fois 600 Marks dès le 29 mai, et à nouveau 160 Marks le 6 juin. On apprend également qu’il a fait une nouvelle demande de permission et qu’il a été versé à la 1ère compagnie de son régiment. Et il arrive à l’improviste le samedi 17 juin à 23 h 45. En vue de cette permission Jeanne avait fait une demande d’autorisation de voyage pour Colmar et Horbourg. La réponse n’est pas arrivée, mais l’autorisation est accordée par téléphone: peut-être faut-il voir dans cette façon peu bureaucratique de régler la question l’influence du respect qu’inspire le nouveau galon d’Alfred à une administration prussienne dévouée à l’armée. Lui-même est conscient de la dignité de sa promotion: dès le lendemain de son arrivée, il fait prendre chez Breitbarth, le magasin de confection de la rue du Sauvage, des mesures pour un nouvel uniforme.

     Du 26 juin au 3 juillet se placent à nouveau des «vacances» en famille qui réunissent Alfred, son épouse et sa fillette dans l’auberge des parents Schmitt de Horbourg. La disette ne s’est pas encore installée à l’arrière du front et le séjour à la campagne n’est pas l’occasion, comme plus tard, de manger à sa faim et d’accumuler du ravitaillement. On se contente d’envoyer un seau de fraises aux parents de Jeanne, restés à Mulhouse. La guerre, toutefois, manifeste sa présence obsédante jusque dans cette campagne profonde: le village et l’auberge sont envahis par la troupe logée chez l’habitant; les officiers font du tapage dans et aux abords de leur "casino" jusque tard dans la nuit; là aussi le canon se fait entendre depuis la vallée de Munster. Le jeudi 6 juillet Alfred prend le train à Mulhouse, à 6 h 21, pour rejoindre son unité. Hansi, qui a grandi, ressent davantage l’absence de son père: elle joue au facteur, portant autour du cou une lettre qu’elle lui destine.

     Enfin, pour clore heureusement cette année 1916, le mardi 19 décembre, Alfred arrive à 18 h, à temps pour les fêtes de Noël. Le 24 est fêté à la maison avec le sapin, et le lendemain c’est le départ pour Horbourg chez les parents Schmitt chez qui on reste jusqu’au Jour de l’An 1917. La fin de la permission est mouvementée. D’abord arrive une carte postale officielle demandant au permissionnaire de revenir le 7 janvier; puis contre-ordre le 4: par télégramme il est avisé d’attendre une décision ultérieure; enfin le 10, nouveau télégramme: il doit rejoindre immédiatement son unité à Mitau/Jelgava en Lettonie. Il part le jour même à 15 h 05. Au passage, il envoie une carte de Berlin.

      L’année 1917 le trouve donc toujours sur le front Est. Le 21 janvier, le journal de Jean Obrecht note qu’une carte est arrivée de Mitau. Il s’agit certainement de cette carte conservée, non datée, qui montre un soldat portant dans son sac à dos un dépliant de vues de la ville et cette simple inscription «Gruss aus Mitau». Le temps n’est pas propice à de plus longs discours: sur une carte, reçue le 31 janvier, Alfred relate qu’il a été envoyé en première ligne huit jours auparavant. La ville de Mitau constitue une position avancée sur la ligne de front à une cinquantaine de kilomètres au nord de Riga. Les Russes ont tenté - sans succès - de reprendre cette position stratégique fin janvier.

     Les choses bougent en effet sur ce front longtemps stabilisé. A la suite des émeutes de février le tsar Nicolas II abdique le 2 mars 1917. Le gouvernement provisoire tente de poursuivre la guerre, mais mutineries et désertions se multiplient sous l’influence de la propagande bolchevique, affaiblissant considérablement l’armée russe. La guerre civile prend le pas sur la guerre aux frontières. La dernière offensive russe, en juin 1917, est stoppée en une semaine.