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Jacqueline Daske en 1963
  
           La rencontre / Les fiançailles / Le mariage / Le temps des voyages
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Que d'émotions!

Entre-temps, la jeune enseignante, qui a de moins en moins la foi pédagogique, poursuit difficilement cette année 1935. Malaises diplomatiques, psychosomatiques ou véritables problèmes de santé ? Elle accumule les congés de maladie. Elle a encore juste le temps de participer au Bal des Instituteurs, le 9 février, avant que le Dr. Stephan, qui la soignait déjà comme petite fille, ne lui accorde trois semaines de congés à partir du 14. A peine a-t-elle repris les cours depuis une quinzaine que, le 21 mars, elle consulte à nouveau le médecin de famille et un Dr. Will Pierrot qui prescrit une radio du poumon au Diaconat. Il s’agissait d’un examen de routine en ces temps où la tuberculose était encore fréquente, mais la patiente ne présentait en fait aucun symptôme alarmant, hormis une fatigue due à une profession difficile exercée à contrecœur. Pourtant le lendemain, le Dr. Stephan, très compréhensif, accorde trois mois de congés à une malade qui ne se privera pas d’excursions et de voyages.

    C'est ainsi qu'au joli mois de mai notre institutrice en rupture de bancs met à profit son congé pour passer presque quatre semaines en Forêt-Noire, non pas en cure de repos, mais en excursions pédestres (elle note avoir acheté des «souliers de montagne»). Elle fait allusion à des amis de Fribourg, les Trost, mais elle passe la première nuit, le 6 mai, à l'Armée du Salut. Le lendemain elle gagne Hinterzarten où elle s’installe dans une pension qui offre sa terrasse par beau temps - sans doute déjà le café-pension Imbery où on reviendra l'année suivante. A part un tour en voiture avec Robert Trost et la belle-soeur de celui-ci jusque Lindau, elle rayonne autour de son lieu de villégiature, prenant parfois le bus pour l’aller et revenant à pied.    

    Hinterzarten
est en effet particulièrement bien situé pour organiser des randonnées vers les principaux sites touristiques de la région: Titisee, Feldberg, la sombre vallée du Höllental et la pittoresque chute d’eau de la Ravennaschlucht. Elle passe même par Alpirsbach d'où est originaire la famille de sa future belle-mère, ce qu'elle ignore. Ce mois de mai est en fait assez frais: soleil, pluie et neige alternent, et il faut faire du feu dans la chambre. Pour le week-end du 18 mai Jean, accompagné de Mme Schmitt, vient rejoindre sa fiancée et ils refont ensemble les excursions les plus spectaculaires déjà effectuées par Jeanne, en particulier au Titisee où ils se retrouvent les pieds dans la neige au sortir de la gare. On profite de l’appareil photographique de Jean: le même rocher accueille pour la postérité la mère et la fille, puis le jeune couple.  Au retour, le 31 mai, c'est à nouveau à l'Armée du Salut que Jeanne loge à Fribourg.

    Trois jours avant l’expiration de ces «grandes vacances», Jeanne note qu’elle est allée voir «M. l’Inspecteur d’Académie» à Colmar. Une mise au point s’impose sans doute, et elle a dû laisser entendre qu’elle envisageait de quitter l’enseignement. Elle paraît avoir repris la classe, très provisoirement, en juillet et participe à une excursion de fin d’année à la Schlucht avec l’école le 13 juillet. Cependant, déjà au mois de juin, à la suite de maux de ventre, elle avait consulté un spécialiste, le Dr. Goldbach. Diagnostic: «Appendicite!!!». On avait tergiversé, mais le 11 juillet, deux autres médecins, les Dr. Krach et Zettel, recommandent l’opération qui a lieu le 16 juillet à 10 h au Diaconat. La patiente sort le 27 et rentre en taxi au domicile familial.

Des affiniés très électives

     On remarquera à ce propos l’assiduité de l’ami Charles (Daske). En l'absence de Jean, à Evreux pour raisons professionnelles, il ne se rend pas moins de quatre fois au chevet de la patiente durant sa courte hospitalisation. Au sein du petit groupe d’amis les quatre frères Daske - Paul, Henri, Charles, Jean - et leur soeur Marie font partie du cercle le plus intime depuis le début. La famille Daske, originaire de Königsberg en Prusse Orientale, s'est installée à Mulhouse quand le père, Friedrich (1875-1940), a ouvert dans la Grand'rue un atelier de menuiserie, repris ensuite par son fils Henri (1905-1987). D’après de discrètes allusions ultérieures de Jeanne, elle avait en Marie Daske (1912-1978) une sérieuse concurrente auprès de son fiancé. Elle-même semble servir de confidente à Charles qui, si l’on en croit l’agenda, lui rend de fréquentes visites. Au cours de celles-ci il arrive qu’on débatte des affaires de cœur qui surgissent naturellement au sein d’un groupe de jeunes gens; ainsi le 16 mars a lieu une «explication concernant Jacqueline» (Haas). Charles, en effet, paraît très proche de Jacqueline Haas, la meilleure amie de Jeanne. Sur des photographies prises fin juillet 1934 au Jardin Zoologique où on les voit se donner le bras. Charles est également de la partie lors d'une visite aux parents Haas à Sainte-Marie-aux-Mines en septembre de la même année.

    Les «affinités électives» auraient pu s’organiser selon une autre constellation… Le destin en ayant décidé autrement, il restera une amitié cultivée de loin. Charles  (1906-1938) enverra encore en janvier 1937 une photographie d'une sortie de ski au Markstein en souvenir des journées passées ensemble à la neige. En lieu et place de Jacqueline Haas il a uni sa destinée à Jenny Fey (1907-2006) qui fait partie du même groupe d'amis et apparaît plusieurs fois dans l'agenda de Jeanne à cette époque. Parmi les invités de la noce on remarque Jean et Jeanne pas encore réunis. Paul/"Paulet" Daske (1903-1987), de son côté, unit sa destinée à Hélène Waibel (1903-1984). Quant à Marie elle épouse en octobre 1934 André/"Dédé" Bonigen (1909-1991), rencontré au SUM où elle-même joue dans l'équipe de basket. Le SUM a vraiment été pour cette jeune génération protestante le catalyseur autour duquel se sont cristallés les différents couples.



Quatre Daske    

 Avec le mariage, et les voyages qui ont suivi, les relations se sont distendues. Depuis, le temps a fait son oeuvre et brouillé les pistes. Encore en novembre 1939 Jean et Jeanne, de passage à Paris, poussent jusque Puteaux pour rendre visite à Jenny Fey, veuve de Charles prématurément décédé en octobre 1938,  mais sans la trouver. Le couple a eu une une fille Christiane, pharmacienne, qui est aussi décédée assez jeune et sans enfant. L'autre couple Daske - Paul et Hélène -  installé à Marseille, a en tout cas, gardé des contacts suffisants avec Jean et Jeanne pour les choisir comme parrain et marraine de leur fille Jacqueline. Des photographies témoignent encore d'une rencontre avec la famille Daske et leurs trois enfants à Marseille en juin 1948, à Saint-Quentin en avril 1952, à nouveau à Marseille en juin 1957, et enfin en Alsace en août 1963. Le couple Bonigen - André et Marie (Daske) - a quitté lui aussi l'Alsace; ils ont eu une fille Claire, née à Courbevoie en 1946. Ils se sont installés ensuite à Cosne-sur-Loire où Jean et Jeanne avec leurs enfants leur ont rendu visite en mai 1951. Ils ont été parrain et marraine de Georges, le plus jeune des enfants Krebs. En 2011, lorsque des contacts ont été repris avec elle, Claire Bonigen était installée à Paris.

      Depuis le début de l’année civile Jeanne n’a pas enseigné deux mois en tout. Elle n’assurera pas la rentrée de 1935: mariée, elle estime n’avoir plus à travailler et, le 17 septembre, elle adresse une lettre à l’Inspecteur (elle n’écrit plus « M. l’Inspecteur »!) qui ne peut contenir que sa démission. Elle sera contactée dans les années 50 pour reprendre du service, l’Education manquant de personnel à la suite du «baby boom». Elle n’a, bien entendu, pas donné suite.

      En attendant, durant le mois d’août, les préparatifs matériels du mariage vont bon train. Il y a la confection de la robe, depuis l’achat de l’étoffe le 3 août jusqu’au dernier essayage chez la couturière, Hélène Fogt, le 29 août. C’est cette même couturière qui en juillet 1918, alors prénommée Helena, avait confectionné à domicile une robe de soie pour la mère de Jeanne. Une note «chez les Stoll» indique que la fiancée a été présentée par Jean à la parenté. Les fiancés posent en effet le 15 août dans le jardin des Stoll avec toute la famille devant une somptueuse Fiat 11cv. Les invitations sont envoyées le 12 août et les bancs publiés le 16 à Wittelsheim, apparemment le lieu de résidence officiel de Jeanne. Il semble qu’il y ait eu au dernier moment une difficulté imprévue. Les 27 et 28 août, Jeanne et sa mère se rendent chacune à leur tour à Wittelsheim; à ce propos apparaissent des allusions énigmatiques: tribunal, sous-préfecture, fiche du procureur, puis «enfin réglé». Est-ce un problème administratif lié à la nationalité de Jean? La veille de ces démarches, il y avait eu une visite au consulat de Suisse, certainement pour déclarer le mariage qui est effectivement enregistré dans le registre de citoyenneté d'Oppligen, mais à la date erronée du 21 aôut.



chez les Stoll
       

Paul Daske


Charles Daske


Jean Daske


Marie Daske


André Bonigen